Santhiou Bouna

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21. Coiffure

jeudi 13 février 2003, par Christophe D.


Amadou rase la tête de son frère Ali avec une lame de rasoir. Comme ça, à cru. Je n’en reviens pas et le regarde faire attentivement. Il s’en sort bien et sans le couper une seule fois, mais il faut dire qu’ici on se rase la barbe de la même façon.

Avec la lame, la femme d’Ali se met à découdre un vêtement. Je me dis que ça serait une bonne idée de lui offrir mes ciseaux dans leur pochette en plastique. Elle est ravie et Sidi qui nous a observés me demande de lui en offrir également une paire pour se tailler la moustache. Je n’en ai pas d’autre, mais j’ai amené dans mes bagages une tondeuse mécanique que je n’utilisais plus depuis des années. Elle se présente dans une jolie boite en carton jaune et rouge, accompagnée d’une petite brosse, d’un ressort de rechange et d’une fiole d’huile. La voilà attribuée.

Je demande à Amadou si quelqu’un sait coudre ici. Il m’explique qu’il y avait un bon tailleur mais qu’il est devenu fou et qu’il ne travaille plus. Je sais qu’au Sénégal c’est plutôt une activité masculine, mais je suis quand même surpris que les femmes ne fassent pas de vêtements.
— Ma mère, elle sait coudre, mais elle sait seulement faire les robes anciennes.
Bref, elle ne sait pas tailler les modèles à la mode et la pièce de tissu que j’ai acheté à Ndeye devra donc être cousue à Meckhé.

On grignote des arachides, on joue à l’ombre. Soudain j’entends de grands éclats de rire. Amadou a essayé la tondeuse sur la tête d’un de ses amis et lui a rasé une bande de cheveux. Il faut maintenant terminer. J’en profite pour montrer comment on doit s’y prendre. Cisailler vite et progresser lentement pour ne pas faire mal. On se relaie car c’est fatigant, mais tout le monde a envie de s’y essayer.

— NON !

J’ai crié, mais trop tard. Modou a planté la tondeuse dans le sable plutôt que de la donner en main propre à celui qui allait le relayer. Il faut démonter l’engin et l’essuyer avec attention. Leçon de mécanique donc. J’explique qu’on peut contrôler à l’oreille s’il y a encore du sable. On finit par réussir à bien la nettoyer. Une goutte d’huile entre les lames et je termine moi-même la coupe de cheveux.

Le tondu est content du résultat. Avec ses cheveux très denses et crépus on n’arrivait pas à le raser à la lame et il aurait été obligé de se payer le coiffeur à Meckhé. Une chose est maintenant sûre, la tondeuse ne servira pas qu’à Sidi.

Peut-être même y aura-t-il un coiffeur institué l’année prochaine au village ?


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